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Sœurs du Saint-Cœur de Marie

QUESTIONNAIRE SPIRITUEL
rédigé par
Notre Digne MÈRE GONZAGUE
le 13 mai 1883

À la plus grande gloire
de JÉSUS et de MARIE
Édition manuscrite de 1884

Un vieux texte en apparence poussiéreux et démodé… C’est ainsi qu’apparaît, au premier coup d’œil, le «Questionnaire Spirituel» dans lequel Mère Gonzague rassemble pour ses sœurs, présentes et à venir, l’essentiel de sa doctrine au sujet de la vie religieuse. Et si vous tentiez l’aventure de vous laisser un peu dérouter en le lisant?

Pour lire le Questionnaire Spirituel accompagné du commentaire du Père Jean-Marie Hennaux, cliquez ici. Pour lire le texte directement, restez ici !

La gloire de Dieu et le salut des âmes. 

Parce que le Divin Sauveur dans son Incarnation n’a eu en vue que la Gloire de Dieu, son Père, et nous devons l’imiter. 

Ces moyens sont ceux que recommande l’Évangile et qu’autorise l’exemple même du Divin Sauveur. 

R. La sainteté d’une religieuse se trouve dans l’imitation des vertus du Divin Sauveur et de Marie Immaculée, son plus beau modèle.

R. Je le sais parce que Dieu le Père, au baptême de Notre Seigneur, a dit ces paroles : Voici mon Fils bien-aimé en qui j’ai mis toutes mes complaisances : Imitez-le.

R. Non, mais seulement des moyens puissants pour acquérir les vertus indispensables à l’accomplissement des devoirs qu’on y contracte, et qui ne s’acquièrent pas uniquement par l’oraison mais surtout par la mortification.

R.  Saint Ignace a posé dans ses constitutions, comme fondement des solides vertus qui doivent soutenir notre Institut, l’abnégation continuelle de soi-même. Notre Seigneur a voulu également qu’elle fût la base de toute perfection chrétienne, puisqu’il a dit : Que celui qui veut venir à moi se renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix de chaque jour et me suive.

R. Nous devons faire usage de la prière et de la méditation pour acquérir par ces moyens une parfaite mortification de tous nos penchants désordonnés.

R. Cette religieuse serait hors de l’esprit de sa vocation et ne ferait pas une oraison conforme à l’esprit de l’institut si elle restait attachée à son propre jugement et ne se soumettait qu’avec peine aux ordres des supérieurs qui contrarieraient ses inclinations ou sa volonté.

Elle doit conduire au renoncement intérieur de tout jugement propre, pour soumettre sa volonté à l’obéissance ; c’est par là que nous devenons des instruments dignes de travailler au service du prochain et au salut des âmes, but réel de l’institut ; ou, en d’autres termes, à la plus grande gloire de Dieu. 

R. Aux âmes d’élite qu’il sépare de la foule des chrétiens, qu’il honore d’une grâce plus abondante et qu’il destine à un plus haut degré de gloire.

R. Ce sont les trois conseils évangéliques. La pauvreté, par laquelle la religieuse se dépouille de toutes choses ; la chasteté, par laquelle elle s’immole comme une hostie vivante, et l’obéissance par laquelle elle s’anéantit.

R. Parce que Dieu le Père veut que le Divin Sauveur se dépouille de tout l’éclat de sa divinité, de toutes les richesses de sa gloire, et qu’il paraisse dans l’état d’un homme pauvre et abject, il entre dans ce dessein, quitte son palais éternel, consent à naître dans une étable, à vivre dans l’indigence et à mourir dans le dénuement absolu de toutes choses. L’âme religieuse voit Jésus-Christ dans cet état, elle l’entend qui l’appelle à sa suite, elle ne peut résister à la voix du Bon Pasteur, et, sans écouter les répugnances de la nature, elle lui dit aussitôt ce qu’il disait lui-même à son Père : Me voici, Seigneur, me voici prête à accomplir votre volonté tout entière.

R. L’âme religieuse voit Jésus-Christ pauvre, et, parce qu’elle le connaît pour son modèle, elle veut à tout prix être pauvre comme Lui. Héritier de toutes choses et souverain Maître de l’univers, il ne possède rien, et n’a pas même de quoi reposer sa tête. Pour l’imiter autant qu’elle peut, elle renonce aux biens qu’elle a hérités de ses Pères, s’ôte le droit d’en disposer et d’en jouir, et devient étrangère à tout ce qui lui appartenait le plus légitimement.

 R. Il a déposé toutes les marques de sa Suprême grandeur et se cache non seulement sous le voile de l’humanité, mais encore sous des vêtements grossiers et vils aux yeux même des hommes. C’en est assez pour qu’elle s’empresse de déposer tous les titres qui la distinguent, et jusqu’au nom qu’elle a reçu en naissant, et qu’elle renonce au désir d’être, de se faire valoir, de parler d’elle ou des siens d’une manière avantageuse, ni de relever son savoir-faire ou de faire ressortir les bévues de ses compagnes, de les abaisser et ainsi de se relever soi-même.

R. II lui dit qu’il sera le trésor des pauvres volontaires ; et parce qu’elle le connaît pour (la vérité même) le Souverain bien, elle estime ce trésor plus que toutes les richesses de la terre, elle regarde comme une perte tout gain qui l’en priverait, et comme un monceau de boue tout l’or et l’argent qu’il faut sacrifier pour l’acquérir. Il promet le centuple en cette vie et une éternelle félicité dans l’autre, à tous ceux qui auront tout quitté pour le suivre ; et parce qu’elle le connaît pour la vérité même, elle se fie à sa promesse. Elle envisage la pauvreté évangélique, moins comme un sacrifice que comme un céleste trafic ; elle croit placer à intérêt tout ce qu’elle abandonne et semer dans une terre féconde tout ce que le monde croit qu’elle jette ; elle sème ainsi avec joie et elle est sûre de recueillir dans des transports d’allégresse infinie. 

R. Le fils de Dieu, non content de se dépouiller de toutes choses, s’immole encore lui-même pour accomplir la volonté de son Père. « Les oblations, lui dit-il, et les holocaustes n’ont pu vous plaire, mais vous m’avez donné un corps ; me voici, que je sois une victime (agréable) à vos yeux et que je satisfasse votre justice ». Il sacrifie en effet sa chair innocente ; et après avoir vécu dans les privations et les travaux, il expire dans les tourments sur la croix. L’âme religieuse contemple son Sauveur mourant, elle sait qu’Il demande d’elle un semblable sacrifice, et elle le lui offre par le vœu de Chasteté. Car la chasteté parfaite, dont le monde est loin d’avoir une juste idée, est un véritable holocauste de tout l’homme, par lequel le corps est immolé comme une hostie vivante, et le cœur comme une victime spirituelle.

R. Le corps est immolé, non seulement par la privation de tous les plaisirs sensibles, mais encore par la contrainte sévère imposée à tout l’homme extérieur ; par cette mortification habituelle et universelle qui est le crucifiement de la chair et des sens. Une Vierge consacrée à Jésus-Christ a des yeux pour ne point voir les objets créés, des oreilles pour ne point entendre la voix des hommes, une langue pour ne parler qu’à Dieu seul, ou de Lui ; des membres pour les sacrifier à la pénitence; de sorte qu’elle peut dire avec lApôtre : « Je suis attachée à la croix de mon Sauveur et je m’y consume lentement » ; elle vit pour mourir à toute heure ; c’est une hostie vivante. 

R. Il faut qu’elle immole une victime spirituelle, le cœur, et qu’elle le fasse aussi mourir. Le cœur vit d’affection et d’amour. Les attachements naturels pour les proches, les amis, les personnes dont la société plaît, semblent lui être aussi nécessaires que l’existence. Oh ! qu’il en coûte de rompre ces liens si doux et si légitimes ! C’est arracher en quelque sorte ce cœur sensible à lui-même. Mais celle qui aspire à être l’épouse de Jésus-Christ connaît la jalousie de ce Divin Amant des âmes ; elle sait que toute affection dont il n’est pas l’objet l’offense, et que ce n’est pas être digne de lui que d’aimer autre chose sans l’aimer Lui-même. En conséquence, les attaches les plus justes, les penchants et les goûts les plus innocents sont réprimés, combattus, sacrifiés. C’est la mort entière de la victime et la consommation de l’holocauste.

R. Mais non, si les vœux de Pauvreté et de Chasteté l’ont dépouillée et immolée, ils ne l’ont pas anéantie. Après avoir renoncé aux biens de la terre, à toutes les jouissances des sens et aux attachements naturels, elle conserve encore une volonté libre et quelques droits sur elle-même. C’est ce que lui ôte le vœu d’Obéissance, qui la pousse enfin jusqu’au néant. Car n’est-ce pas un vrai néant qu’une créature raisonnable qui ne peut rien penser, rien vouloir, former aucun projet sans l’impulsion ou la permission d’autrui ? Aussi le grand Apôtre parlant de l’obéissance de Notre-Seigneur la nomme-t-il anéantissement. « Il s’est anéanti lui-même en prenant la forme de serviteur ». Cette dépendance absolue est la destruction entière du vieil homme, parce qu’elle renverse jusqu’au fondement de l’amour propre et de l’orgueil. C’est aussi ce que la superbe impiété a toujours vu de plus odieux dans les vœux de religion. Mais ce qu’elle hait est précisément ce qui charme l’humble vierge que la foi éclaire. Elle connaît le maître qu’elle a choisi, elle a compris que se rendre son esclave, c’est devenir libre, que s’anéantir pour lui et avec lui, c’est acquérir un nouvel être. Et en effet que ne trouve-t-elle pas dans cet heureux néant où elle s’est réduite.

R. La religieuse ainsi transformée se repose dans le sein de l’obéissance, elle ne connaît ni troubles, ni perplexités, ni incertitudes ni remords. Ses déterminations, ce n’est pas elle qui les forme ; ses démarches, ce n’est pas elle qui les conduit, elle a un pasteur, toute la sollicitude est pour lui, toute la sécurité pour elle. Il lui parle par sa règle et par l’organe de ses supérieurs ; elle n’a d’autre soin que d’écouter sa voix et de faire ce qu’il commande ; elle ne peut s’égarer en le suivant. Elle marche dans une voie toujours lumineuse et toujours sûre, s’y avance avec une consolation ineffable et sent augmenter son espérance et sa joie à mesure qu’elle approche du terme. Si elle persévère jusqu’à la fin, elle dira en mourant : « J’ai achevé ma course, j’ai gardé la foi jurée à mon Époux, il ne me reste que d’attendre la couronne de justice qu’il m’a promise ».

Ressource

COMMENTAIRE DE JEAN-MARIE HENNAUX, S.J., SUR LE QUESTIONNAIRE SPIRITUEL DE MÈRE GONZAGUE
La Hulpe, le 29 mai 1993, veille de la Pentecôte

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Aujourd’hui

Présenter, sur le modèle d’autrefois, un horaire-type qui reflète notre vie d’aujourd’hui n’est guère possible. La Loi de Vie de 1967 écrivait déjà : « Tu es pauvre du temps qui appartient à Dieu, ce qui nécessite un effort de travail sérieux, dans une totale disponibilité intérieure ». Nos journées n’échappent évidemment pas à toute structure ou à toute rencontre commune, mais c’est la mission qui leur donne forme, à l’intérieur du cadre communautaire : chaque sœur œuvre au nom de toutes là où elle a reçu de la supérieure générale de manifester la mission confiée par l’Église à la Congrégation. La communauté, par des rendez-vous quotidiens (temps de prière, de services et de repas partagés) mais aussi des réunions fréquentes (rencontres d’échanges en tous genres) soutient ainsi la vie de tout le corps, grâce à une miséricorde toujours à recevoir à nouveau ensemble de la Bonté de Dieu.

Les Constitutions de 1988, demandent, au chapitre sur la pauvreté, que « chaque communauté adapte son style de vie aux nécessités des personnes et de l’apostolat ». L’écoute persistante de « ce que l’Esprit dit aux Églises » – dans la Congrégation, la communauté et l’existence de chacune – modèle ainsi le temps commun et personnel, que ce soit à l’échelle de la journée, de la semaine ou de l’année. Et c’est, comme autrefois, toujours dans l’Eucharistie que l’oraison personnelle, les temps de récollections ou de retraites, et les autres formes de ressourcement trouvent leur fondement et leur sommet.

1923

D’après les notes manuscrites de Sœur Marie-Claire (1981 et 1985)

4h30
4h30

Lever

«On ne sonnait pas quand les pensionnaires étaient là. Sœur Antonia passait dans les dortoirs en disant : “Venite, Adoremus”»

5h00-6h00
5h00-6h00

Prière du matin

«À la chapelle ; on descendait en pantoufles.
Prière du matin ; très longue, environ 20 minutes. Une suite de prières dont j’ai oublié le texte. Il y avait entre autres les 10 commandements de Dieu, les 5 commandements de l’Église, tous les actes, et cela se terminait par : “Que m’arrivera-t-il aujourd’hui, ô mon Dieu ?”. Méditation jusque 6h00. La Révérende Mère s’asseyait, le dos au mur, à côté du confessionnal, lisait passage par passage la méditation, le saint du jour ou un livre de la spiritualité de l’époque, souvent d’un jésuite.»

6h00-6h30
6h00-6h30

«Temps libre pour mettre ses souliers.
Certaines s’occupaient du lever des enfants qui allaient toutes à la messe, sauf celles du petit dortoir.»

6h30
6h30

Messe

7h15
7h15

Petit déjeuner

«Déjeuner, toujours en silence ; chaque vendredi à genoux. Lecture par la Révérende Mère de quelque passage de la Sainte Règle.»

8h30-11h45
8h30-11h45

Classes

«Après déjeuner, on allait à son travail.
Les classes commençaient à 8h30.»

11h45
11h45

Prière et examen

«Examen à la chapelle, terminé par l’Angelus.» Elle ajoute : «C’est notre sœur Laurence qui m’a, mot à mot, appris les 5 points d’examen selon saint Ignace. Je m’en sers encore.»

12h00-12h30
12h00-12h30

Dîner

«Dîner. Début en silence. Chacune avait son tour pour la lecture. Au dîner, une sœur lisait une vie de saints (je l’ai fait longtemps).»

12h30-13h00
12h30-13h00

Récréation

«Récréation en communauté. Aucune ne pouvait quitter la place sans permission.»

13h30-16h00
13h30-16h00

Travail

À 16h00 : «Goûter en silence»

16h15
16h15

Visite au Saint-Sacrement

«La Révérende Mère disait une prière et puis 5 Pater, 5 Ave, les bras en croix.»

17h45
17h45

Instruction

«On se réunissait en communauté. Lecture jusque 18h30. La Révérende mère lisait des livres de formation religieuse. On pouvait coudre pendant cette lecture.»

18h30
18h30

Prière

«Salut mercredi, jeudi, samedi. Les autres jours, chapelet et litanies de la Sainte Vierge.»

19h00
19h00

Souper en silence

18h30-20h30
18h30-20h30

Récréation en communauté

20h30
20h30

Prière du soir

«Examen de conscience dont les points différaient. Consécration au Sacré-Cœur devant la statue du Sacré-Cœur dans le corridor. La Révérende Mère donnait la bénédiction.»

21h30
21h30

Coucher

«Coucher rapide. Tout était éteint ¼ d’heure après.»

1869

D’après les Premières Constitutions

5h00
5h00

Lever

5h30
5h30

Oraison

À 5h30, l’oraison commence par l’Angelus, et s'achève par la «revue de l’oraison»

7h00
7h00

Messe

7h30
7h30

Petit déjeuner

8h00-11h15
8h00-11h15

Classe

Le temps de classe pour les enfants est interrompu à 10h00 par la récréation qui se poursuit par l’étude.

11h30
11h30

Dîner des enfants

11h45
11h45

Examen particulier

12h00
12h00

Dîner

Le dîner des Sœurs est précédé de l’Angelus et du Benedicite. Il se conclut par les Grâces. Un temps de lecture et de récréation le poursuit.

13h30-16h00
13h30-16h00

Classes

Le temps de classes de l'après-midi est suivi du goûter des enfants.

16h15
16h15

Visite au Saint-Sacrement

16h30
16h30

Chapelet des élèves

18h00
18h00

Instruction

19h00
19h00

Méditation

19h30
19h30

Souper

20h00-21h00
20h00-21h00

Récréation

Constitutions 1869 : «À neuf heures moins 5 minutes, réunions extraordinaires de la communauté par ordre de la supérieure.»

20h00-21h00
20h00-21h00

Prière du soir

À la prière du soir, on lit les points d’oraison du lendemain, et on fait l’examen de conscience.

21h30
21h30

Couvre-feu

«Un quart d’heure avant la fin de la prière de l’examen, la visitatrice sonnera le coucher par trois coups ; à ce signal, toutes les personnes de la maison doivent se mettre au lit, si elles n’y sont déjà, et éteindre la lumière.»